Shen Fermentation, pour une alimentation vivante
Avez-vous lu « Le charme discret de l’intestin » ? L’ouvrage de Giulia Enders, paru en 2015 a fait beaucoup pour réhabiliter notre tube digestif dans l’imaginaire collectif où il ne tenait certainement pas la place la plus glamour. Grâce à son essai, souvent très drôle et provocateur, la jeune gastro-entérologue allemande a permis de populariser les découvertes scientifiques qui démontrent l’importance de la santé de notre système digestif sur notre bien être global, tant physique que psychique.
Comment maintenir cet équilibre délicat, mis à mal par la malbouffe et une utilisation excessive d’antibiotiques ? Les cures de probiotiques sont devenues monnaie courante, mais personnellement, nous sommes de fervents partisans du goût avant tout et s’il est possible faire du bien à son organisme en dégustant quelque chose de délicieux, nous sommes preneurs.
Quand nous avons rencontré Sasha Morselli sur le marché bio de Hyères, nous avons été emballés par les saveurs de ses préparations étonnantes, à la fois épicées, aromatiques et qui plus est, bénéfiques pour notre flore intestinale. Alors, nous avons eu envie de connaître le parcours original de cette jeune hyéroise déterminée à faire rimer bon avec bien et découvrir l’histoire derrière sa marque de produits lacto-fermentés, Shen Fermentation.
Une philosophie fondée sur le partage et l’itinérance
Sasha est native du Revest-les-eaux et a grandi à Hyères, mais elle a très tôt eu envie de voir le monde et a passé plusieurs années à sillonner la planète avant de revenir poser ses valises ici, il y a deux ans.
A 18 ans elle part en Grande-Bretagne, puis en Amérique Centrale, pendant un mois et demi. Piquée par le virus du voyage, dès son retour à Hyères, elle prend un aller simple vers la Thaïlande, puis ce sera l’Australie, les États-Unis et enfin le Guatemala ou elle va vivre dans une communauté alternative agricole nichée aux pieds des volcans. Là, auprès de ces néo-ruraux originaires de Californie, ayant optés pour une vie en accord avec leurs convictions environnementales et humaines, elle participe à l’élaboration des différents produits issus de la ferme. La fermentation est à la base d’un grand nombre des préparations qu’ils commercialisent, telles que la bière, l’hydromel, le kefir, le kombucha et bien évidemment le pain.
La notion de partage est centrale car traditionnellement, les ferments lactiques, levures, mères et autres symbiotes qui permettront d’engager la fermentation, se transmettent et se partagent, mais ne font pas l’objet de transactions. Dans cette pratique culturelle, on retrouve aussi l’idée que celui qui possède le savoir-faire de la fermentation a une mission de formation et de transmission, combinée à une itinérance. On porte, en quelque sorte, la bonne pratique de village en village.
Sasha a immédiatement adhéré à cette philosophie et a appris auprès de la communauté, avant de transmettre, à son tour, la maîtrise de ce processus délicat de la lacto-fermentation, sans pasteurisation, seul capable de permettre à un microbiote vivant de se développer dans notre alimentation et dans notre corps.
La nature au travail
Sasha nous résume ainsi le processus de fermentation en nous expliquant que, finalement, la fermentation, c’est laisser la nature faire son travail. Si, effectivement, il s’agit ici d’encourager le développement de bactéries, champignons et parasites non pathogènes, qui constituent notre flore intestinale et lui permettent de se renouveler, dans des préparations alimentaires saines et délicieuses, c’est tout de même un procédé délicat et précis, qui demande quelques explications.
Tout d’abord il faut se familiariser avec l’idée que notre corps abrite un microbiote composé de 2 à 10 fois plus de micro-organismes que nous n’avons de cellules, pour un poids de 2 kilos en moyenne, concentrés en grande partie dans notre intestin. Ces organismes dits commensaux (c’est-à-dire qui vivent en symbiose avec nous sans nous causer de maladies) sont propres à chaque individu et nous sont transmis par notre mère au moment de l’accouchement.
L’environnement, l’alimentation, mais aussi les traitements médicaux peuvent mettre à mal cette flore délicate, nécessaire à l’absorption des nutriments que nous ingérons et qui nous aide à résister aux effets des organismes pathogènes, qui eux, à contrario, nous rendent malades.
En mangeant « vivant », c’est-à-dire en consommant des produits contenant des micro-organismes symbiotiques, nous contribuons à entretenir, renouveler et diversifier cette flore. Les procédés de fermentation permettent à une grande variété de symbiotes de se développer, à condition que celle-ci ne soit pas arrêtée par une pasteurisation, qui détruit toutes formes de bactéries, les bonnes comme les mauvaises.
Les produits cuisinés par Sasha se conservent donc au frais et ont une date limite de conservation (DLC). Pour pouvoir se lancer, et répondre aux normes alimentaires en vigueur en France, elle a dû suivre une formation en hygiène et faire agréer ses recettes. Par ailleurs elle réalise toutes ses préparations dans un laboratoire culinaire agrée.
Ce qui fait la vraie différence avec ses recettes, c’est le choix de mettre en avant le goût et de réveiller nos papilles en même temps que notre système immunitaire.
Le goût avant tout!
Les recettes sont totalement véganes et bio et les légumes cuisinés par Sasha sont ceux de deux amies cultivatrices locales Carotte et Cocotte, dont la micro ferme est située à La Garde.
Au fil de ses voyages, Sasha, qui adore la cuisine, a découvert des goûts qu’elle avait envie de travailler dans ses recettes. Elle fabriquait depuis longtemps une moutarde un peu sucrée et avait envie d’associer sa saveur à celui du chou de la choucroute. Le Kimchi coréen, une recette de chou chinois fermenté, assaisonné de piment d’ail et de gingembre, lui a aussi servi de base d’inspiration. Ainsi sont nées ses deux premières recettes pour sa marque, Shen Fermentation, l’Ensoleillée et La Piquante.
Les recettes sont totalement véganes et bio et les légumes cuisinés par Sasha sont ceux de deux amies cultivatrices locales Carotte et Cocotte, dont la micro ferme est située à La Garde, ainsi que ceux de chez Trucco à Solliès Toucas. Chez eux, elle a sélectionné des choux verts lisses, carottes, radis, ail, oignons et cébettes, qu’elle associe à différents condiments.
Elle a opté pour une fermentation courte de 15 jours pour conserver le croquant de ces bons légumes et la suavité de leur goût. En effet plus la fermentation est longue, plus l’acidité se développe et les légumes ramollissent.
Sasha développe doucement son répertoire de recettes, l’aventure de Shen Fermentation a tout juste un an. Elle a concocté un vinaigre de pommes et une nouvelle composition de légumes fermentés au goût citronné, nommée La Pétillante. Il sera bientôt possible de la découvrir et d’échanger avec Sasha pendant le marché nocturne de Pierrefeu, qui recommence en Mai. On peut aussi retrouver les petits pots de Shen Fermentation dans une dizaine d’épiceries locales, dont Alliance Ethik à Hyères ou la Cerise sur le Gapeau à La Farlède et désormais à La Ruche qui dit oui!
