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Laure Joly Accompagnatrice de la Transition

Laure Joly : Just Look up!

 

Le baromètre est à l’orage et ne semble pas vouloir revenir au beau-fixe. La succession des crises, qu’elles soient climatiques, politiques, sociales, nous fait sentir qu’il ne s’agit pas de phénomènes isolés, mais d’un emballement systémique.

Peu à peu nous prenons conscience d’une vérité première : nous humains, sur cette terre sommes liés à elle et les uns aux autres de façon indéfectible. Notre simple existence, chacun de nos actes, impactent notre environnement qu’il soit humain, animal ou végétal, produisant le meilleur, comme le pire.

Le sixième rapport du GIEC, rendu public fin Février ne dit pas autre chose. Ainsi, Hoesung Lee, son président, écrit-il en préambule : « Ce rapport reconnaît l’interdépendance du climat, de la biodiversité et des populations humaines et intègre davantage les sciences naturelles, sociales et économiques que les évaluations précédentes du GIEC».

Ce document nous apprend aussi que, même si la situation est grave elle n’est pas encore désespérée. Il est toujours possible d’agir efficacement pour amoindrir les effets délétères de nos activités. Bien sûr on se sent un peu démunis. On se dit que rouler en vélo, acheter des produits de seconde main, trier nos déchets, consommer local, c’est bien beau, mais que si l’on continue de produire à tout va et que les entreprises ne s’engagent pas, à quoi bon ?

Alors, à un moment de notre histoire où il est parfois difficile de garder confiance en l’avenir, rencontrer une femme comme Laure Joly, c’est prendre un grand bol d’air frais et rallumer une petite étincelle.

Laure Joly œuvre pour accompagner des grandes entreprises dans une refonte totale de leur stratégie, afin de placer au cœur de leurs modèles économiques la nécessité de s’inscrire dans l’écologie et la durabilité. Pas de greenwashing au programme, mais une vraie réflexion pour penser de nouveaux modèles faisant cohabiter rentabilité, croissance modérée et préservation de l’environnement.

C’est au terme d’un parcours riche et d’une prise de conscience qui puise ses sources dans un engagement croissant pour la défense de l’environnement, que Laure a forgé ce métier d’accompagnatrice de la transition. Un rôle taillé sur mesure pour cette hyéroise pétillante, que nous avions envie de vous faire découvrir.

Le droit mène à tout, à condition d’en sortir.

Laure Joly affiche un grand sourire en permanence et rayonne d’une énergie communicative, caractéristique de ceux qui ont foi en ce qu’ils font. Mais ce chemin vers sa vocation est loin d’avoir été linéaire.

Laure a toujours eu un rapport très sensible à la nature et nous raconte comment c’est à Hyères, chez ses grands-parents établis sur les collines de la Californie, dans la maison où elle s’est installée, qu’enfant elle a pris conscience de son lien physique et émotionnel avec la nature.

Son histoire familiale est ancrée dans ces paysages et ces restanques au cœur desquelles, son arrière-grand-mère maternelle cultivait des fleurs à la fin du 19ème siècle. Petite elle voulait être vétérinaire dans la brousse, soigner les grands félins, un désir qui selon elle combinait ses racines familiales entre ruralité agricole et bourgeoisie citadine. Mais finalement c’est le droit qui l’a happée.

C’est en tant que juriste dans de grandes entreprises, que Laure a commencé sa carrière. Après avoir obtenu l’examen du barreau elle s’est orientée vers le droit des affaires et plus particulièrement le risque industriel. Son quotidien est alors rempli d’expertises judiciaires consécutives à des incidents graves. Cette situation au cœur de la gestion de conflit ne lui convient pas, mais comme elle le formule simplement « Avec l’expérience on apprend que les portes ça ne se défonce pas. Quand on n’arrive pas à les ouvrir, il faut trouver un autre moyen de rentrer. » Et l’on se dit que finalement cette expérience est devenue un atout indéniable dans son nouveau rôle, qui lui permet aujourd’hui de comprendre au mieux les rouages des grandes multinationales.

Elle évolue et travaille pour Heineken chez qui elle supervise tous les aspects juridiques de la supply-chain, c’est-à-dire tout le processus de production depuis les relations avec les fournisseurs jusqu’à celles avec les distributeurs.

En 2015 elle sillonne la Colombie sac au dos pour trois semaines. Là-bas elle va rencontrer dans un village des membres de la tribu amérindienne Kogi. Les Kogis appliquent des préceptes d’équilibre naturel à toutes leurs actions qu’ils évaluent à l’aune de leur impact sur l’environnement humain, végétal et animal avant de prendre une décision.

Elle explique s’être sentie totalement incongrue au sein de cette communauté. Leur façon de vivre en symbiose avec leur environnement lui fait prendre conscience que son style de vie a perdu du sens.

A partir de ce moment elle décide d’aligner ses convictions profondes avec son activité professionnelle. En 2016, lors d’un bilan de compétences elle formalise son souhait de changer de métier et d’entreprise, malgré les difficultés que présentent ce double virage et en Janvier 2017 elle quitte Heineken. Elle détermine les 3 sujets qui lui tiennent vraiment à cœur : l’enfance, l’alimentation, l’environnement. Sa transition personnelle est lancée.

« Avec l’expérience on apprend que les portes ça ne se défonce pas. Quand on n’arrive pas à les ouvrir, il faut trouver un autre moyen de rentrer. »
— Laure Joly

La fresque du climat : sensibiliser citoyens et entreprises au dérèglement climatique. Un dessin vaut souvent mieux qu’un long discours

Quel meilleur moyen pour sensibiliser les citoyens et les entreprises que de les amener à découvrir par eux même, grâce à des données scientifiques, les causes et conséquences du dérèglement climatique en construisant intuitivement un outil graphique liant ces éléments entre eux ? C’est ce que se propose Cédric Ringenbach, créateur de l’outil de la Fresque du Climat que Laure rencontre en 2017.

Convaincue de l’efficacité pédagogique de sa démarche elle s’engage à ses côtés et crée avec lui l’association de La Fresque du Climat en 2018. Elle anime dès lors des ateliers en entreprise mais aussi auprès d’étudiants et les accompagne dans l’élaboration de leur propre fresque.

La Fresque permet un éveil des consciences et oriente des choix individuels faciles à mettre en œuvre au quotidien, qu’il s’agisse de la gestion de l’énergie dans l’habitat, les déplacements, les modes de consommation, mais aussi pour les entreprises d’opter pour des choix stratégiques limitant leur empreinte carbone et permettant l’innovation par l’éco-conception des produits.

La Fresque est un outil très efficace pour la prise de conscience de l’impact individuel de chacun et ouvre la réflexion sur une approche systémique dans laquelle toutes nos actions sont liées. Sa disponibilité en open source la rend facilement diffusable et beaucoup de fresques dédiées à un secteur d’activité spécifique ont vu le jour depuis 5 ans.

Poussant plus loin, c’est au travers d’une réflexion globale et des rencontres avec des acteurs majeurs de la lutte contre le dérèglement climatique que Laure va approfondir l’approche systémique esquissée par la Fresque.

Une approche systémique de l’écologie pour imaginer le changement

A la suite de la COP 21 et des accords de Paris en 2015, une réflexion s’esquisse sur l’élaboration d’un pacte juridique de droit de l’environnement, grâce auquel les signataires pourraient être sanctionnés pour non-observation des règles des accords. C’est Laurent Fabius, alors ministre des affaires étrangères ayant mené les négociations, qui est à l’origine de cette nouvelle doctrine, reprise par Le Pacte Mondial pour l’Environnement dans lequel Laure s’engage en 2018, après avoir rencontré l’équipe passionnée qui la mène. Le pacte sera adopté devant les Nations Unies avec une majorité de 145 états contre 5, mais non des moindres : les US et la Russie faisant partie des opposants. Mais le texte adopté est une faillite par rapport aux ambitions de départ et s’est transformé en une simple déclaration politique d’intention.

Qu’importe, Laure continue de se nourrir de ces échanges avec ceux qui ont le pouvoir d’infléchir le cours des choses, tel Al Gore qu’elle rencontre en 2018 lors de son séminaire californien Climate Reality Project. Au Global Climate Action Summit à San Francisco qui regroupe des universitaires, des décideurs de grandes entreprises, des ONG, elle échange avec Nancy Pelosi. la Présidente démocrate de la Chambre des Représentants des Etats-Unis, qui lui transmet un message qui va faire son chemin dans l’esprit de Laure : Think global, act local!

C’est en rejoignant l’association Renaissance Écologique en 2019 que Laure va pleinement développer sa vision systémique de l’environnement et connecter tous les leviers pour permettre une transition écologique et sociétale, s’appuyant sur la famille, l’éducation, la culture, l’industrie, la mobilité, l’agriculture… 24 chantiers en tout, sur lesquels l’association crée des interconnections.

Les quatre mois du confinement passés à Hyères dans la maison familiale vont lui permettre de peaufiner son approche de la transition en trois étapes et finir de la convaincre que c’est bien localement, dans les territoires que l’action doit être menée pour être efficace.

Penser globalement, agir localement

Pour Laure c’est une évidence, les produits et ressources sont en région, pas dans les grandes métropoles et elle croit très fort aux chances de résilience du Var, dont le challenge principal est le risque d’incendies. Alors pour elle, vivre et travailler ici, c’est se réaligner avec les valeurs qu’elle défend et être en cohérence avec ce qui la faisait vibrer enfant, tout en étant au cœur de l’action.

Elle vient de débuter sa nouvelle mission d’accompagnatrice de la transition pour ImmaTerra, une Société Coopérative d'Intérêt Collectif qui depuis 2015 accompagne des entreprises développant des modèles d’économie de la fonctionnalité. Ces entreprises développent des modèles dans lesquels elles restent propriétaires des biens qu’elles produisent et les mettent à disposition des clients finaux, privés ou publics via des systèmes locatifs, par abonnement. On peut citer en exemple les systèmes Vélib ou Autolib, Michelin qui propose aux transporteurs routiers de ne plus acheter de pneus mais de les payer aux Kilomètres parcourus, les réparations et recyclage étant pris en charge par Michelin. Les exemples de cette économie d’usage abondent dans tous les secteurs.

Ce modèle vertueux permet l’accès pour un plus grand nombre à des produits éco conçus d’utilité courante, dans les transports, l’équipement,.. S’intégrant dans un système plus large d’économie circulaire, il remplit un rôle soci-économique essentiel, tout en limitant les quantités de biens neufs mis sur le marché et en prévoyant dès leur conception les modalités de réparation et leur recyclage en fin de vie.

Laure croit fermement en la viabilité de ces systèmes qui permettent de repenser la place des entreprises. Pour elle la transition écologique est une fusée à trois étages. Au premier étage se situe la prise de conscience, au second la capacité d’imaginer le changement, via l’analyse systémique et enfin le passage à l’action pour engager la transformation à grande échelle au troisième étage.

En intervenant sur la stratégie des entreprises qu’elle accompagne, Laure a mis le feu au troisième étage d’une fusée qui va les emmener vers un changement de paradigme essentiel pour que les acteurs économiques s’engagent durablement pour répondre à leur obligation de responsabilité sociale et environnementale.


Pour prolonger la réflexion, des livres qui font du bien :


L’économie symbiotique, Isabelle Delannoy, éditions Actes Sud

Isabelle Delannoy, environnementaliste et Co-scénariste du film Home, réalisé par Yann Arthus-Bertrand nous propose ici les principes d’une nouvelle économie régénérative des ressources. Dans ce livre rempli d’exemples concrets, elle s’appuie sur les progrès de la permaculture, de l’économie circulaire, de la production durable, pour démontrer qu’une activité économique prospère peut cohabiter avec le développement de nos ressources et non son épuisement.

 Et si... le monde d'après ne ressemblait pas au monde d'avant, collectif, Alternatiba.

Alternatiba et 60 intellectuel-les se sont associé-es pour réaliser des récits fictionnels ou documentaires, des illustrations qui proposent une vision de ce que pourrait être notre société.

Qu’ils soient artistes, philosophes, économistes, climatologues travailleurs sociaux…tous offrent des idées d’actions concrètes pouvant toucher tous les publics afin de n’exclure personne et de se nourrir de la richesse des échanges, pour créer un futur vivable pour tous. 

Urgence climatique - Il est encore temps !, Etienne Lécroart, Ivar Ekeland, éditions Casterman.

On garde l’espoir : il est encore temps d’agir nous disent Etienne Lécroart et Ivar Ekeland, Mathématicien, économiste et philosophe, entouré des spécialistes et acteurs qu’ils interrogent. Ils détaillent des moyens d’action et nous montrent la voie !